Pour une nouveau modèle de management

Face aux contraintes économiques et sociales, les organisations peinent à modifier en profondeur leur mode de fonctionnement, de management et leur stratégie. Elles rencontrent de grandes difficultés pour passer d’une logique de réaction à une logique d’anticipation.

Si cette approche était mise en œuvre, l’humain serait considéré comme une ressource qu’il faut développer, faire évoluer et en laquelle il faut investir. La notion de compétence commencerait à se diffuser.

La réalité est bien différente, et les risques psychosociaux n’ont jamais été aussi élevés dans les organisations. Quelles en sont les principales causes ?

  • L’intensité du travail et les condition de travail
  • Le manque d’autonomie et de marge de manoeuvre
  • La mauvaise qualité des rapports sociaux au travail
  • L’insécurité de la situation de travail
  • Absence de reconnaissance de la part d’un management hiérarchique exclusivement focalisé sur les chiffres et les résultats

Les principales conséquences de cette situation sont les suivantes :

  1. Burn-out : Syndrome d’épuisement professionnel  » se caractérise par un épuisement général, à la fois physique, psychique et émotionnel, lié au trop-plein de travail. « 
  2. Bore out : État d’ennui au travail tel qu’il conduit, lui aussi, à une forme d’épuisement général, voire de dépression. 
  3. Brown out : Baisse de régime liée à la quête de sens, et de la finalité de son travail par rapport à soi, et à la culture de son entreprise.

Le management hiérarchique est le dénominateur commun des trois syndromes cités ci-dessus. Cela prouve bien que ce modèle de gouvernance ne fonctionne plus parce qu’il n’est plus adapté au contexte, à l’environnement et aux différentes générations.

Pour illustrer cela, je vous propose un focus sur le manager de proximité, pilier de l’organisation trop souvent ignoré par les directions générales et CODIR.

Les principales difficultés ressenties par les managers sont exprimées dans le dernier rapport Alan relatif au baromètre du bien-être mental paru en avril 2023.
Voici celles que les managers rencontrent dans leur quotidien et qui leur apparaissent comme étant les plus sensibles


– Des difficultés à recruter des collaborateurs : 28%
– Un manque d’accompagnement de la part de sa hiérarchie dans son rôle de manager : 27%
– Une difficulté à concilier les demandes de sa hiérarchie et celles de son équipe : 26%
– Un manque d’accompagnement des RH dans son rôle de manager : 24%
– Un sentiment de solitude / d’isolement (entre d’un côté sa hiérarchie et de l’autre côté ses collaborateurs) : 23%
– Une difficulté à atteindre les objectifs fixés par sa hiérarchie : 20%
– Une difficulté à reconnaître les signes de mal-être mental de son équipe : 20%
– Une difficulté à déléguer : 20%

Le décor est planté et il est sans appel…

Constat

Manager n’est pas un métier et ne doit surtout pas l’être. Ce n’est pas non plus une fonction. C’est avant tout un ensemble de compétences, principalement comportementales et relationnelles, qui permettent au manager de proximité d’accompagner une équipe  pour atteindre une performance individuelle et collective.

Et c’est encore moins une promotion. Ce dernier point est la plus grave erreur que beaucoup d’entreprises ont fait et font encore aujourd’hui. En faisant cela, le manager est souvent légitimé par sa hiérarchie sur la base de ses compétences techniques. Oui mais voilà, on ne gère pas une équipe à l’aide de hardskills, cela se saurait….

Pire encore, les nouveaux managers sont généralement promus au sein de leur service, ce qui les amènent à animer leurs ex-collègues. Cette décision hiérarchique, prise souvent par facilité, a de sérieuses conséquences sur le bien-être du manager qui doit gérer les jalousies, rivalités en tous genres.

Intégrons qu’être manager, c’est une posture avant d’être un statut ou un positionnement au sein de l’organisation

Au-delà de la théorie, la réalité est toute autre.

J’ai eu le plaisir d’accompagner des centaines de managers de proximité en 15 ans. Globalement ils sont entre 70% et 80% de leur temps dans l’opérationnel. Ils « font » surtout avant « d’être ». Vous conviendrez aisément que dans ce contexte, il reste peu de place pour l’animation d’équipe. Alors les former, c’est très bien mais quelle est l’utilité d’une session management de proximité dans une telle organisation ?

Le management est le talon d’Achile des entreprises en France. C’est donc toute la culture managériale qu’il faut repenser pour sortir progressivement de telles situations.

Alors quelles solutions pour faciliter la transformation des organisations et faire que les managers de proximité soient reconnus à leur juste valeur ?

  • Le nouveau manager est identifié sur la base de réelles compétences relationnelles et comportementales, et non plus sur ses seules compétences techniques
  • Avec son accord, le manager de proximité est nommé dans un service différent de celui qu’il occupait jusque-là. Cela permettra davantage de transversalité et c’est en quelque sorte le premier pas vers une organisation plus horizontale. Il est plus facile d’acquérir de nouvelles compétences techniques que des talents comportementaux et relationnels.
  • L’organisation de l’entreprise doit permettre au manager dans un premier temps d’équilibrer son temps entre opérationnel et posture managériale. Progressivement cette dernière devra devenir prioritaire
  • Le manager de proximité suit un parcours de développement des compétences professionnelles établit sur la durée (1 an). Fini les sessions de 2 jours consécutifs et bonne chance…Charge à l’entreprise de trouver la bonne articulation pour libérer le manager 1 jour par mois pour lui permettre se réaliser son parcours.
  • En parallèle, le manager de proximité nouvellement nommé doit pouvoir bénéficier d’un mentorat tout au long de sa première année.
  • Le manager de proximité est associé aux décisions stratégiques de l’entreprise, parce que la vraie vie c’est sur le terrain. Les directions générales se privent trop souvent de retours d’expérience parce que les managers de proximité ne sont pas suffisamment consultés. Combien de fois ai-je pu entendre « On va de nouveau dans le mur, et on ne tient pas compte des expériences précédentes » 
  • Le bien être des collaborateurs est un enjeu sur lequel les entreprises commencent à se pencher. Elles ne doivent pas oublier celui des managers, parce que sans eux, l’organisation peut se gripper rapidement.

En conclusion

Les managers de proximité d’aujourd’hui seront les dirigeants de demain. Les entreprises doivent faire preuve d’innovation managériale pour sortir de ce carcan du management hiérarchique et s’orienter progressivement vers un management transversal appréciatif. En mettant en œuvre ces premières pistes, les entreprises vont reconsidérer leur Marque Employeur, stratégie qui aujourd’hui est encore floue pour un grand nombre d’entre elles.